lundi 17 décembre 2012

La France préfère l' Idéal à l' argent


En prenant un peu de hauteur, on s’aperçoit que la France est habitée par un idéal qui dépasse ses simples intérêts à brève échéance. C’est un idéal de vertu, de justice, d’indépendance également. Un idéal qui ne comporte rien de transcendant (c’est là son originalité), et dans lequel le politique domine tout le reste. Cet idéal n’est pas apparu avec la France, nous l’avons hérité, et il nous vient directement de la Rome antique. 

S’il y a une nation qui peut légitimement se réclamer du modèle romain, ce n’est certainement pas l’Italie catholique, c’est bien la France. De nombreuses raisons historiques expliquent sans doute ce fait. On pourrait évoquer la ferveur avec laquelle la Gaule conquise a adopté les usages romains, de sorte que les Gallo-romains ont perpétué les principes et le mode de vie de Rome longtemps après que les invasions barbares eussent brouillé les choses en Italie ; on pourrait évoquer le fait que c’est Clovis qui a emporté la dernière enclave de l’empire romain en 487 à Soissons, et qu’il a déposé à cette occasion Syagrius, l’ultime souverain de Rome, de sorte qu’il y a continuité parfaite entre l’empire romain et la nation française, comme il y en avait une entre Rome et Troie par l’intermédiaire d’Énée, dernier des Troyens et premier des Romains. Mais c'est surtout dans le caractère sacré qu'ils attribuent à la chose publique que les Français descendent des Romains. 

Il est aisé de déduire de tout ceci les qualités que les Français recherchent chez leurs dirigeants : ils veulent que ceux-ci manifestent ce que les Romains appelaient l'imperium, c’est-à-dire la souveraineté, la capacité de dominer les circonstances. La grande popularité dont a joui et dont continue à jouir chez certains l’ancien président Nicolas Sarkozy s’explique par le fait que, malgré son impuissance patente et sa malhonnêteté foncière, il possédait au plus haut degré les apparences de cet imperium, cette faculté de trancher, d’imposer sa volonté aux autres. 

De même, c’est parce que François Hollande est totalement dépourvu d’imperium, parce qu’il n’y a plus rien en lui de romain, qu’il est si impopulaire. Les Français veulent être dirigés par un César (peu scrupuleux mais efficace) ou par un Caton (austère mais vertueux) ; dans tous les cas, ils veulent mettre du sens dans l’action publique, et c’est parce que la politique n’a plus de sens qu’ils ont perdu tous leurs repères depuis tant d'années.

Si l’on prend ceci en considération, on s’apercevra que le malaise français est facile à expliquer. Les Français ont oublié leur vocation. Ils ont été séduits un temps par le modèle anglo-saxon, la dérégulation et le communautarisme. Après avoir éprouvé bien des déconvenues, ils sont perdus, ils ne savent plus qui ils sont ni ce qu’ils veulent. Il leur suffirait pourtant de relire la description que donne Tite-Live de la nation romaine dans les premières pages de son Histoire de Rome pour se reconnaître, ou du moins pour reconnaître leur propre idéal : « Aucune nation n’a montré plus de grandeur, plus de vertu, et n’a prodigué plus d’exemples profitables ; aucune cité n’a accueilli aussi tardivement la cupidité et le vice, aucune n’a tenu si longtemps la pauvreté et l’épargne en honneur. »

Maintenant, quelle issue peut-on trouver à ce désarroi ? 
Le sursaut, on le sent, ne peut venir que d’une refondation complète de notre pacte social. Cette refondation doit être incarnée par un homme, car en France le peuple ne consent aux grandes mutations que lorsque celles-ci prennent le visage de responsables auxquels il accorde sa confiance. Il faudrait que ce dirigeant possède les vertus romaines, c’est-à-dire françaises, au premier rang desquelles la probité ; qu’il soit courageux, indépendant, volontaire ; qu’il soit cultivé, car en France rien ne se fait sans la culture ; il faudrait qu’il ait des origines plutôt modestes dans la situation de crise que nous vivons, qu’il possède un lien avec la terre, qu’il ait été agriculteur par exemple, comme 

Cincinnatus, comme Caton l’Ancien ; il faudrait également que nous ayons enfin un dirigeant qui connaisse un peu l’histoire romaine, qui ait enseigné le latin par exemple, ou même qui soit agrégé de lettres classiques. Alors seulement la France retrouverait ses valeurs profondes, qui n’ont rien à voir avec celles de l’argent. Un tel homme politique existe-t-il en France ?

Le malaise français - AgoraVox le média citoyen

2 commentaires:

Unknown a dit…

Bonjour, pour l'analyse, je suis d'accord avec la nécessité du "leader maximo". Mais je crois que le mal est plus profond. La France est une nation de villages, de quartiers, de régions, de "pays". Or, cela n'existe plus guère, et les conseils de sages ne sont plus là. La France a été longtemps aussi un pays de villes libres, avec des échevins et des bourgeois qui prenaient des décisions ensemble. Les liens sociaux n'existent plus guère. La tentation est grande de se référer au chef, au Tyran mais ce n'est pas la mentalité profonde française, bordélique, insubordonnée, indépendante, râleuse...Nous sommes en crise des valeurs humaines, la division est partout et personne ne va dans le sens de trouver des solutions. En effet, Hollande a voulu se poser en rassembleur et en arbitre, on a du mal à voir ce qu'il en est, c'est vrai. Il a parlé de justice aussi. Les gens veulent du changement réel. Il n'est pas là. Le progrès n'est pas dans un mariage pour tous pour ceux qui pensent être étranglés et tondus à tort ou à raison par les impôts...d'où son impopularité.

Anonyme a dit…

Oui, il existe... François Bayrou....
Non, je rigole.....