dimanche 27 mars 2016

[Vidéo] La fin des Ottomans

[Vidéo] La fin des Ottomans

Source : Youtube, 22-03-2016

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Comment, de l'indépendance grecque (1830) à l'avènement de la République turque (1923), le démantèlement de l’Empire ottoman a porté en germe les conflits contemporains. La passionnante traversée d’une page d’histoire aussi cruciale que méconnue. Premier volet : les nations contre l'Empire.

Cette première partie rappelle comment, à partir de 1821, date du soulèvement grec, jusqu'aux guerres balkaniques de 1912-1913, l'Empire ottoman se retire définitivement d'Europe, mettant un terme à près de cinq siècles de présence dans les Balkans. Cette histoire commune fut celle d'une coexistence complexe entre peuples chrétiens, musulmans et juifs, organisés par millet, ou communautés confessionnelles. Mais les appartenances religieuses vont progressivement cristalliser des identités nationales rigides et exclusives – serbes, grecques, bulgares… –  aujourd'hui encore en conflit, plus de quinze ans après la fin des guerres de Yougoslavie.

Six siècles durant, l'immense Empire ottoman a imposé sa puissance sur trois continents et sept mers. Terre des Lieux saints des trois monothéismes, mosaïque de langues, de cultures et de religions sans équivalent dans l'histoire, cette puissance exceptionnelle s’est pourtant effondrée en moins d'un siècle, de l'indépendance de la Grèce, premier État-nation à s'émanciper de l'Empire en 1830, jusqu'à l'avènement de la République de Turquie en 1923, sous l’égide de Mustafa Kemal Atatürk. Des guerres israélo-arabes à l’éclatement de la Yougoslavie, de l’invasion de l’Irak au chaos syrien, ses ruines et ses lignes de faille, autant ethniques que religieuses, ont façonné un monde moderne dont les fractures multiples apparaissent désormais au grand jour. Passionnant et dense, ce documentaire en deux parties retrace avec fluidité la mécanique politique, économique et sociale qui a conduit l'Empire ottoman à sa fin. Grâce à des images d’archives rares et aux contributions éclairantes d’historiens américains, européens et proche-orientaux, il fait revivre une page d’histoire largement méconnue, mais essentielle pour comprendre les bouleversements contemporains.

(France, 2014, 53mn) ARTE F

Partie 1/2

Partie 2/2

Source : Youtube, 22-03-2016

 

Ne ratez pas : “La Fin des Ottomans”

Source : Le Nouvel Obs, Ingrid Sion, 22-03-2016

Jeunes Turcs (© Seconde Vague Productions)

Jeunes Turcs (© Seconde Vague Productions)

1830-1923 : la chute d'un Empire ou le récit d'un siècle de chaos et de violences, des Balkans au Moyen-Orient, qui éclairent d'un jour nouveau les conflits contemporains.

La perspective historique permet bien souvent de mieux comprendre le monde et ses bouleversements. En deux heures denses mais passionnantes, ce film de Sylvie Jezequel et Mathilde Damoisel résume l'effondrement de l'Empire ottoman après six cents ans de domination, qui, des Balkans au Moyen-Orient, permet de mieux appréhender les guerres en ex-Yougoslavie et au Moyen-Orient. Ce récit d'un siècle de « violences et de chaos » est scindé en deux parties : « les Nations contre l'Empire », de l'indépendance grecque, en 1830, à 1912 ; et « le Moyen-Orient en éclats », de la Première Guerre mondiale à la proclamation de la République turque en 1923. Les deux documentaires, nourris de précieuses images d'archives et de témoignages d'historiens et de politologues européens et proche-orientaux, sont portés par la voix de l'actrice Nathalie Richard, qui raconte cette « histoire complexe entre différents peuples et confessions religieuses », ainsi définie par l'historien anglais Mark Mazower, et les fractures qui en découlent aujourd'hui.

Guerres et massacres aux Balkans

Le premier volet relate les guerres pour l'indépendance des peuples balkaniques. Jusqu'en 1820, chrétiens orthodoxes, catholiques arméniens, juifs et musulmans, organisés par millets (communautés confessionnelles), coexistaient depuis plus de quatre siècles au sein d'un Empire où les non-musulmans avaient des droits restreints (ils étaient notamment soumis à un impôt spécifique). Au XIXe siècle, sous l'influence des idéaux de la Révolution française, ces peuples, dotés d'une langue et d'une croyance, aspirent à l'émancipation. Les Grecs sont les premiers à mener leur révolution et, après huit ans de guerre, accèdent à l'indépendance. Un mouvement suivi par les autres peuples balkaniques. La révolte des paysans serbes (1875), l'insurrection des Bulgares (1876) et le soulèvement des Arméniens au Sassoun (1894), réprimés dans le sang par les bachibouzouks (mercenaires ottomans) et l'armée ottomane, aboutissent à la naissance de nouveaux Etats. A l'aube de la Première Guerre mondiale, les nations balkaniques brisent leur alliance contre l'oppresseur ottoman et se déchirent pour la Macédoine. Le partage des territoires en 1913 entérine les atrocités tandis que le Kosovo, foyer de la rébellion albanaise, revient à la Serbie… Plus de 400 000 personnes sont déplacées de force, des musulmans en grande majorité. « Le début de ce que nous appelons aujourd'hui le nettoyage ethnique. Ce qui s'est passé dans les années 1990est un exemple et une pratique qui a commencé à la fin du XIXe et qui a explosé au début du XXe », commente Mark Mazower.

La fin des Ottomans (1 & 2)

Fractures au Moyen-Orient

Le second film s'intéresse à la rupture entre Arabes et Ottomans qui sonne le glas de l'Empire. En 1915, les Jeunes-Turcs planifient le premier génocide du XXe siècle : les deux tiers de la population arménienne de Turquie sont exterminés, soit plus d'un million de personnes. Au printemps 1916, l'Empire réprime violemment le mécontentement croissant de ses provinces arabes : activistes et intellectuels sont arrêtés et pendus à Damas, Beyrouth et Jérusalem. Au mois de juin, le fils du chérif de La Mecque, Fayçal, soutenu par les Britanniques, mène la révolte contre les forces ottomanes, aux côtés de Lawrence d'Arabie. Damas tombe en 1918. De Palestine en Mésopotamie, l'armée ottomane et ses alliés allemands capitulent. La Première Guerre mondiale a précipité le déclin de l'Empire. De ses dernières provinces orientales d'Arabie (Mésopotamie, Syrie et Palestine) va naître le Moyen-Orient d'aujourd'hui : « Des frontières, des Etats, des fractures qui jamais n'ont cessé de se raviver » – des frontières imposées aux Arabes par les puissances colonisatrices. Ainsi, en 1921, un nouveau Royaume d'Irak est fondé ; à sa tête, Fayçal, prince sunnite, appelé à régner sur une majorité chiite…

Ce partage des territoires est vécu comme une humiliation par les Ottomans. Emmenée par Mustafa Kemal, une armée de libération nationale se révolte contre le pouvoir impérial. Le commandant turc s'empare de Smyrne et massacre sa population grecque. La République de Turquie est proclamée le 29 octobre 1923. Un Etat moderne et laïque, où l'identité religieuse conditionne néanmoins l'identité nationale. En 1924, près d'un million de Grecs ottomans, chrétiens, doivent quitter la Turquie ; en Grèce, 500 000 musulmans sont expulsés. « Grands oubliés du partage de l'Empire ottoman », les Kurdes, ni arabes ni turcs, sont dispersés entre l'Irak, la Syrie et la Turquie… L'Empire ottoman a disparu. Sa dislocation a transformé le Moyen-Orient en zone de conflits souvent confessionnels.

Source : Le Nouvel Obs, Ingrid Sion, 22-03-2016

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