samedi 16 avril 2016

Derrière Nuit Debout, le retour de la question sociale

Derrière Nuit Debout, le retour de la question sociale

Si je suis souvent d'accord avec l'œil de Brutus, et je le remercie de me donner l'occasion de parler de Nuit Debout, en revanche, je ne suis pas du tout d'accord avec le billet qu'il m'a proposé « De la 'manif pour tous' à 'nuit debout' : un même combat ». Au contraire, dans une époque plus portée aux débats identitaires ou sécuritaires, j'y vois un retour bienvenu au débat sur la question sociale.



Debout face au capitalisme actionnarial

C'est un mouvement bien sympathique, d'autant plus qu'il est le produit de la mobilisation contre la loi dite travail, qui consacre une nouvelle fois l'avancée des actionnaires et des dirigeants des grandes entreprises dans l'agenda économique de notre pays. Après avoir obtenu d'un gouvernement dit de gauche environ 50 milliards de baisse du prix du travail, le gouvernement a orchestré un savant éparpillement du droit du travail par le biais d'accords individuels primant sur un cadre global. Heureusement, la mobilisation commence à faire un peu reculer la majorité, encore qu'il ne faille pas surestimer ses reculs. De cette mobilisation est née Nuit Debout, un mouvement inspiré des luttes des Indignés en Espagne, une occupation citoyenne de la rue pour débattre, mais aussi essayer de changer le monde.

J'espère pouvoir rapidement faire un tour place de la République pour aller rencontrer les participants de cette belle aventure. Alors que notre vie politique manque cruellement de renouvellement, voici le signe que les citoyens veulent faire bouger les choses. Et il me semble qu'ici, ce sont bien les sujets économiques ou sociaux qui motivent cette mobilisation, cette révolte contre le démantèlement de notre modèle social pour faire plaisir aux marchés et aux actionnaires, dans une course sans fin et mortifère à la compétitivité, une manière politiquement correct de nommer la régression sociale, la capitulation de notre collectivité face aux petits mais riches intérêts d'actionnaires qui poussent toujours plus loin leur agenda face à des dirigeants incapables de façonner une autre manière de faire.

Ainsi, je ne vois pas en quoi il y aurait le moindre lien entre Nuit Debout et La manif pour tous, comme le soutient l'œil de Brutus. J'ai même plutôt l'impression que ceux qui campent place de la République seraient majoritairement favorables au mariage pour tous. Les questions ne sont pas les mêmes, Nuit Debout me semblant être avant tout un mouvement social, quand La manif pour tous est identitaire. Et l'évocation d'une loi naturelle pose problème car, après tout, n'y-a-t-il pas un caractère naturel à la loi ultralibérale du plus fort ? La loi de la nature ne doit pas toujours être la loi de l'homme et je persiste à penser que le mariage pour tous est un progrès, non libertaire, car il donne aussi des devoirs, mais bien républicain et égalitaire, un plein accueil des couples homosexuels dans la communauté nationale.

Merci aux gardiens de la place de la République, qui entretiennent une bien belle flamme démocratique et de contestation de l'effarante ligne suivie par nos dirigeants depuis des décennies. Dans une France un peu perdue qui cède de plus en plus aux sirènes ultralibérales, vous êtes une petite lumière qui réchauffe le cœur et entretient l'espoir de tous ceux qui croit à un autre monde. 

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